Ceux ci sont nés boiteux, ceux là sont nés bossus,
L’un un peu moins, l’autre un peu plus :
La nature de cent manières
Voulut nous affliger : marchons ensemble en paix ;
Le chemin est assez mauvais
Sans nous jeter encor des pierres. »
Or il arriva, certain jour,
Que notre bon vieillard trouva dans une tour
Un trésor caché sous la terre.
D’abord il n’y voit qu’un moyen
De pouvoir faire plus de bien ;
Il le prend, l’emporte & le serre.
Puis, en réfléchissant, le voilà qui se dit :
Cet or que j’ai trouvé feroit plus de profit
Si j’en augmentois mon domaine ;
J’aurois plus de vassaux, je serois plus puissant.
Je peux mieux faire encor : dans la ville prochaine
Achetons une charge, & soyons président.
Président ! cela vaut la peine.
Je n’ai pas fait mon droit, mais, avec mon argent,
On m’en dispensera, puisque cela s’achète. »
Tandis qu’il rêve & qu’il projette,
Sa servante vient l’avertir
Que les jeunes gens du village
Dans la cour du château sont à se divertir :
Le dimanche, c’étoit l’usage,
Le seigneur se plaisoit à danser avec eux.
Page:Œuvres complètes de Florian, Fauché-Borel, 1793, tome 9 - fables.djvu/73
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