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Madame Guilbert avec ironie.

Vraiment ?… par quel motif ? Il est souffrant ce soir !
Mais cet accueil n’a rien qui puisse nous surprendre.
Ses collègues et lui sont jaloux de mon gendre ;
Ils devaient s’emparer de cette occasion ;
Ils viennent d’envoyer tous leur démission.
Dercourt n’est pas ici ?

Valentine.

Dercourt n’est pas ici ? Non.

Madame Guilbert.

Dercourt n’est pas ici ? Non.Quelque espoir nous reste.
Contre la trahison notre parti proteste ;
Cette confusion peut même le servir
Et doubler le pouvoir qu’on cherche à lui ravir.

Valentine avec impatience.

Pour la vingtième fois le sort nous favorise
D’un de ces doux moments qu’on appelle une crise !
Ah ! quel ennui !

Madame Guilbert.

Ah ! quel ennui !D’abord, c’est monsieur Martinet
Qui devait composer le nouveau cabinet.
En ce cas on mettait Champmaillart à la guerre,
Borde à l’intérieur, qui ne lui convient guère ;
Car ce qu’il faut flatter dans leur ambition,
Ce n’est pas leur talent, c’est leur prétention.
Rien ne peut éclairer leur sottise aveuglée.
Tout intrigant se croit diplomate d’emblée ;
Les avocats pour tout se mettent sur les rangs,
Et l’Université séduit les ignorants.

Valentine.

Nos grands hommes d’État se font par ordonnances ;
Sans scrupule ils mettraient un soldat aux finances.

Madame Guilbert.

Ah ! rien ne les arrête, et quand ils sont en train,
Mon Dieu ! d’un hydrophobe ils feraient un marin.
Cette combinaison était donc adoptée ;
Mais les cent trente-trois bientôt l’ont rejetée.
Autre combinaison : Cordière et Badiveau
Sont chargés de former un cabinet nouveau.