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Edgar.

Les tableaux de Morin sont bien connus pourtant.
Son talent…

Valentine.

Son talent…Son talent, tout le monde le nie.

Edgar.

Morin n’en est pas moins un homme de génie.

Valentine.

Lui donner ce travail, je vous le dis tout bas,
Les journaux crieraient trop, on ne l’oserait pas !

Edgar.

Les journaux ! voilà donc l’éternelle réponse !
Il faut qu’un grand talent à tout espoir renonce,
Lorsque dans les journaux il n’a pas un soutien,
Car pour lui le pouvoir désarmé ne peut rien !
Madame, pardonnez si j’ose vous déplaire,
Mais je ne puis cacher ma trop juste colère.
Je m’indigne de voir ces journaux insolents
Accabler sous leurs coups de sublimes talents,
Et je ne comprends pas qu’écoutant leur malice,
Un ministre éclairé se fasse leur complice.

Valentine.

Ne vous emportez pas, je parlerai pour lui.

Edgar.

Ah ! protégez ses droits, faites-vous son appui !
À vous il appartient de prendre sa défense,
De venger noblement un vieillard qu’on offense !
Mon pauvre maître, hélas ! il est si malheureux !

Valentine.

Oui, je veux seconder vos désirs généreux.
Je ne vous promets pas la victoire complète,
Mais j’obtiendrai… C’est lui, je cours à ma toilette.

(Elle sort.)
Un Laquais.

C’est monsieur le baron Morin.

Edgar.

C’est monsieur le baron Morin.Bien, on l’attend.