Page:Œuvres complètes de Delphine de Girardin, tome 6.djvu/40

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Cornélie.

Tout le monde en riait tantôt à l’Opéra…
Belle nymphe aux abois, c’est ainsi qu’on me nomme.

Martel.

Le traître de Pluchard !

Cornélie.

Le traître de Pluchard ! Oh ! c’est un vilain homme !
Je l’ai toujours haï, je ne veux plus le voir.

Martel à part.

Il va me dire encor : Je remplis un devoir.
Il faut la consoler.

(Il se lève et va s’asseoir près d’elle sur le canapé.)
(Haut.)

Il faut la consoler.C’est une indigne ruse.
Va, je les punirai ; ce tour n’a pas d’excuse ;
Ils savent tous combien je te suis attaché.

Cornélie.

Le bel attachement !

Martel.

Le bel attachement ! D’honneur, j’en suis fâché !
(À part.)
Ce coup est à la fois maladroit et barbare,
Car ces sinistres-là, c’est moi qui les répare.
Je ne la vois jamais chagrine sans effroi :
Ses consolations sont mes malheurs, à moi.
(Haut.)
Allons, il ne faut pas que cela te tourmente,
Tu n’as jamais été plus jeune et plus charmante :
Toujours tes petits pieds, et tes beaux cheveux d’or,
Et tes grands yeux d’azur…

Cornélie très-radoucie.

Et tes grands yeux d’azur…Ce n’est pas tout encor
J’ai perdu mon manchon.

Martel avec effroi.

J’ai perdu mon manchon.Elle devient câline.

Cornélie.

Un superbe manchon en martre zibeline.

Martel à part.

Ce manchon égaré me paraît menaçant.
Je n’aime pas du tout ce regard caressant.