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Scène III.

OCTAVE, MATHILDE.
Octave se levant et fermant la porte.

Seuls un moment par hasard… (Il s’approche de Mathilde, qui se lève aussitôt et reste immobile.) De grâce, écoutez-moi, je vous en supplie ! Laissez-moi promettre à votre père que bientôt vous reviendrez chez lui.

Mathilde.

Je vous l’ai déjà dit, je veux, je dois rester ici.

Octave.

Vous devez demeurer chez vos parents, dans votre famille.

Mathilde.

Ma famille est celle-ci… celle de l’homme que je devais épouser.

Octave.

Je comprends que vous ayez voulu le pleurer près de sa sœur et de sa mère dans les premiers jours de votre chagrin ; mais après trois mois de deuil, il me semble…

Mathilde.

Eh ! monsieur, si j’étais sa veuve, j’aurais le droit de porter son deuil toute ma vie.

Octave.

Alors ce serait différent… les convenances…

Mathilde irritée, passant à gauche.

Eh ! qu’appelez-vous les convenances ? Je pleure avec ceux qui ont la même douleur que moi, voilà pour moi les seules convenances.

Octave.

Vos devoirs de fille…

Mathilde.

La mère d’Adrien est pour moi une mère.

Octave.

Mais enfin, votre père….

Mathilde.

Mon père est remarié ; il est heureux : il n’a pas besoin de moi, et je suis certaine que, sans vos observations… inutiles, mon père n’aurait point songé à me rappeler à Paris.