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La Comtesse.

Je vous remercie, mon bon Léonard. Attendez que je vous fasse demander ; vous ne partirez que ce soir, il est possible que nous ayons encore besoin de vous… Au revoir.

(Léonard s’éloigne tristement.)

Scène VIII.

HECTOR, LA COMTESSE.
(Dès que Léonard est parti, la comtesse se laisse tomber sur un fauteuil à droite et sanglote.)
Hector avec violence, la regardant pleurer.

Mais vous croyez donc tout ça, vous !…

La Comtesse.

Monsieur de Renneville, je vous rends votre parole, vous êtes libre.

Hector indigné.

Je n’en veux pas de ma liberté !… Je vous dis, madame, que votre fille est innocente, et je ne comprends pas que vous en doutiez, vous, sa mère !… Eh bien ! moi, qui ne l’ai pas connue enfant, moi qui ne l’ai point portée sur mes bras à son berceau, moi qui n’ai pas vu comme vous croître sa beauté, s’épanouir sa jeune âme, se développer sa jeune et brillante imagination, sa pensée si noble, si pure, moi qui la connais à peine, je la déclare, je la juge, je la sens innocente !

La Comtesse.

Vous l’aimez, et l’amour…

Hector.

L’amour ne cherche pas à se flatter dans la jalousie ; au contraire, il est avide de soupçons, et pour que moi, qui devrais douter, j’aie foi malgré l’évidence, — oh ! je reconnais l’évidence ! — c’est que la vérité me frappe, m’inspire et me rend lucide malgré tout.

La Comtesse.

Ce récit… l’attachement de Léonard pour notre famille, pour cette enfant qu’il lui faut accuser…

Hector.

Léonard a mal vu, c’était une autre femme, quelque jeune fille qui avait intérêt à le tromper…