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Jeanne.

Non, monsieur.

Des Tourbières.

Vous aimez M. de Renneville ?

Jeanne.

Puisque je l’épouse.

Des Tourbières.

Ce n’est pas toujours une raison.

Jeanne.

Pour moi c’est la meilleure. Si je ne l’aimais pas, je ne l’épouserais pas ; rien ne m’y oblige.

Des Tourbières.

Vous le croyez. Madame votre mère vous a dit : Aime ! et vous aimez. C’est de l’obéissance filiale.

Jeanne.

Non vraiment ; je connais des personnes que je n’aurais jamais pu aimer… par ordre.

Des Tourbières à part.

C’est pour moi qu’elle dit cela. Elle est ravissante ! (Haut.) À vrai dire, il est charmant.

Jeanne.

N’est-ce pas ?

Des Tourbières.

Il vous aime, lui ?

Jeanne.

Pas encore, mais !…

Des Tourbières.

Et quand donc vous aimera-t-il ? où est l’obstacle ?

Jeanne.

Je ne sais pas encore ce qu’il faut être pour lui plaire, mais quand je le saurai !…

Des Tourbières solennellement.

Mademoiselle, croyez-moi, suivez le conseil d’un ami : pour lui plaire… restez ce que vous êtes.

Jeanne voyant entrer la comtesse.

Voici maman ; adieu, monsieur. Je vais voir mes colombes.

Des Tourbières.

Allez, mademoiselle, et empêchez-les de se battre

(Jeanne sort par la droite.)