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Madame de Blossac.

Il est là avec l’ambassadeur d’Angleterre ; il va revenir.

Des Tourbières.

Oh ! mais vous avez l’air triomphant ! Est-ce que le père Renneville a fulminé ? Est-ce que la bombe a éclaté ?

Madame de Blossac.

Pas encore.

Des Tourbières.

Comment ! cette intéressante famille n’est pas encore au désespoir ? Qui peut donc vous rendre si heureuse ?

Madame de Blossac.

Le mal m’afflige toujours, monsieur, et si je n’avais la conscience que je rends service, je n’aurais pas le courage de désoler des gens que je respecte ; mais c’est un devoir. Il s’agit…

Des Tourbières.

De déshonorer une honnête famille en perdant une jeune fille.

Madame de Blossac.

Au contraire, monsieur, il s’agit d’empêcher une famille honnête de se déshonorer en adoptant une fille perdue.

Des Tourbières.

C’est un point de vue différent. Dans le monde, tout dépend du point de vue… Mais entendons-nous… Je suis un franc vaurien, je m’amuse des méchants… mais je ne suis pas de leur confrérie. J’ai le goût du bien… naturellement… comme artiste. Où me menez-vous ? J’ai besoin de vous comprendre. Si mademoiselle de Clairmont est coupable, ce n’est pas à moi de défendre son honneur, et je vous laisse faire. Mais si Jeanne est innocente… songez-y bien ! je suis votre confident, mais je ne veux pas être votre complice.

Madame de Blossac.

Rassurez-vous… j’ai toutes les preuves de sa faute.

Des Tourbières.

Est-ce le témoignage de Valleray ?… Il la défendra. C’est un honnête homme… Il faut vous défier de lui.

Madame de Blossac.

Charles Valleray est à Smyrne. (À part.) Je sais ce que je fais.