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LE VICOMTE DE LAUNAY.

Discours de M. Mauguin :

Air de Joconde.

J’ai longtemps parcouru le monde,
J’ai vu tous les États du czar ;
Je crois sa sagesse profonde,
Je ne parle point du hasard.
Messieurs, pour la gloire française,
Redoutez l’alliance anglaise.
Je viens, prévoyant le danger,
Pour vous conseiller d’en changer.

Je viens, je viens, prévoyant le danger,
Pour vous conseiller d’en changer.

bis.

Mineur :

Mais ce n’est pas de l’inconstance ;
Non, c’est plutôt de la prudence ;
Car des Anglais, sans vanité,
Je connais la sincérité.

Si je veux les quitter d’avance,
C’est pour n’en pas être quitté.

bis.

Je vous le dis, en vérité,
Je connais leur sincérité ;
Car…

La séance est levée.

Discours du lendemain :

J’ai longtemps parcouru le monde,
J’ai vu, etc., etc., etc.

Ce qui n’empêche pas le discours de M. Mauguin d’être un discours sérieusement politique. Si nous le comparons à une musique agréable, c’est qu’après toutes ces déclamations d’acteurs que nous avions entendues, après ces hurlements, ces rugissements de tribuns, la voix sonore et douce de M. Mauguin nous a fait l’effet d’une inappréciable harmonie ; point de cris, point de transports, point d’évanouissements, point de gestes périlleux et menaçants. L’assiette blanche du verre d’eau sucrée ne court aucun danger, nulle tempête oratoire ne la fera voler en éclats. C’est une vivacité intelligente qui vous entraîne sans vous épouvanter ; c’est un langage d’abord simple, qui s’élève naturellement avec l’idée ; c’est une éloquence de bonne compagnie ; enfin c’est quelque chose de très-nouveau