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LETTRES PARISIENNES (1847).

convives, les long des bibliothèques, qui faisaient un effet superbe ; c’était babylonien.

Le bal costumé donné par madame de Ger… était aussi très-brillant. Là, force marquis et marquises ; deux quadrilles de mousquetaires se faisaient admirer : le premier était composé de très-jeunes gens, on les appelait les Mousquetaires d’Alexandre Dumas ; le second était composé de personnages moins jeunes, un méchant les a intitulés : Vingt ans après ! Cette malice est de monsieur… Ne me nommez pas !


LETTRE QUATRIÈME.

Le carême. — Il est avec le ciel des accommodements. — Capituler avec sa conscience pour se persuader qu’on a une conscience. — Levassor maigri. — Théâtre gras, foyer maigre. — Chopin. — Mademoiselle Méara. — Une qualité que tout le monde peut se donner.
7 mars 1847.

— À la Bastille ! au For-l’Évêque !

— Qui donc ?

— Vous !

— Et pourquoi, s’il vous plaît ?

— Pour vous punir de votre audace ; vous avez dit des choses…

— Des vérités.

— Vous avez déplu.

— Eh bien, nous n’avons pas la prétention de plaire en disant des vérités ! Et qu’importe d’avoir déplu à qui ne se soucie pas de plaire ? Notre situation est bien simple : nous ne demandons pas à écrire ; au contraire même, nous demandons à ne pas écrire. On vous l’a dit, nous sommes encrophobe ; cette affreuse liqueur noire, cet abominable cassis littéraire nous est odieux ; mais, nous l’avouons, il nous enivre comme pourrait le faire Un vin délectable. Pour les buveurs, la vérité est dans le vin ; pour nous, la vérité est dans l’encre. Ne jamais respirer ce parfum nauséabond de l’écritoire, ne jamais entendre ce petit bruit taquin de la plume qui salit ces belles pages blanches et qui quelquefois les déchire, ne jamais écrire un seul mot !… tel serait pour nous le bonheur idéal ;