Page:Œuvres complètes de Delphine de Girardin, tome 5.djvu/410

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
402
LE VICOMTE DE LAUNAY.

passer ceux qui ont de gros paquets. Et M. de Balzac qui n’a pas même la croix ; M. de Musset ne l’a pas non plus ; et il y a toutes sortes de hardis inconnus qui se disent hommes de lettres et qui osent porter la croix devant ce véritable poëte, devant ce grand romancier ! Ne pourrait-on pas trouver un député influent qui la demandât pour eux ?



ANNÉE 1847.


LETTRE PREMIÈRE.

Modes de 1847. — L’école tapageuse et l’école mystérieuse.
Les sacrilèges sucrés.
10 janvier 1847.

Dans la république des modes, — on ne dit plus : l’empire de la mode, — deux écoles luttent en ce moment ; on pourrait les désigner ainsi : l’école tapageuse et l’école mystérieuse. Attirer les regards, les éblouir, tel est le but de la première ; captiver les regards, les intriguer, si l’on ose s’exprimer ainsi, telle est l’intention de la seconde. Vous reconnaissez les élèves de celle-ci à leur maintien orgueilleusement évaporé ; elles portent leurs plumes en panache et leurs diamants en diadème. Vous devinez les élèves de celle-là à leur attitude orgueilleusement réservée ; elles portent leurs plumes en saule pleureur, leurs diamants en cache-peigne, étouffés entre deux nattes de cheveux ; ou bien en longues chaînes tombantes, perdues entre les plis de la robe. Les unes veulent produire de l’effet, franchement, imprudemment ; les autres aussi veulent produire beaucoup d’effet, mais sans paraître avoir voulu en produire. Le rôle des tapageuses est simple : choisir des choses extraordinaires, que personne ne porte ; le rôle des mystérieuses est plus compliqué : porter ce que personne ne porte, et avoir l’air d’être comme tout le monde.