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LE VICOMTE DE LAUNAY.

Sensibilité, ni pour l’Abandon, nous lui savons gré de tant de sacrifices et nous la saluons avec respect, comme un modèle d’indépendance et de courage : car il faut de la force d’âme pour oser être de bon goût dans un temps où les vulgarités de toutes sortes obtiennent seules du succès.

Malgré le vent glacial qui soufflait, plusieurs femmes étaient en robe de mousseline blanche, et elles ne semblaient point s’apercevoir du froid ; elles se sentaient jolies, et cela leur tenait chaud. M. de Martignac nous disait un jour : « Les femmes coquettes n’ont jamais froid. » Il avait raison.

Les nouveautés littéraires sont très-nombreuses, et nous avons là sur notre table de bonnes provisions de lecture. Voici, entre autres, un petit livre charmant, rempli de poésie et de piété, chef-d’œuvre involontaire inspiré par l’amour maternel ; s’il est littéraire, c’est malgré lui, cela tient à la brillante éducation de l’auteur. Ces pages n’avaient pas été écrites pour être publiées ; elles exhalent un parfum de solitude, elles ont un charme d’intimité que n’ont jamais les œuvres préméditées, destinées à l’éclat du jour. Le Livre de l’enfance chrétienne explique aux enfants leurs devoirs dans le plus touchant langage, de manière à les leur faire comprendre et aimer.

Le chapitre intitulé Du respect dans l’église est un modèle de style et de description. Être à la fois toujours poétique et toujours à la portée de l’enfance, c’est une grande difficulté vaincue. Le chapitre qui renferme la peinture de l’Envie et de ses souffrances est aussi fort beau. Celui de l’Orgueil est profond, celui de la Paresse charmant ; mais, au reste, tout est bien dans ce petit livre. Quel en est l’auteur ? demanderez-vous. Nous ne pouvons vous dire son nom, mais nous pouvons vous faire connaître toute son âme en citant ces quelques lignes qui terminent sa préface :

« C’est donc aux mères de famille, et à elles seules, qu’est dédié cet ouvrage : il est soumis à leur jugement avec une sorte de confiance ; car, en ce qui touche le bien comme le bonheur de leurs enfants, les mères se comprennent toujours, et près d’elles les sentiments qui ont dicté ces pages leur tiendront lieu sans doute du talent qui manquait pour les écrire. Si Dieu veut bien les rendre utiles, s’il daigne