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LETTRES PARISIENNES (1841).

l’égayait de malins propos. « Quel est ce député qui garde son chapeau dans une église ? demanda une femme placée près de lui. — C’est M. Taschereau… » Le roi arriva, M. le député garda son chapeau ; l’office divin commença, M. le député garda son chapeau ; le corps de l’empereur fut apporté dans l’église ; les vieux soldats s’agenouillaient, les vieux maréchaux s’essuyaient les yeux en se prosternant, les femmes tremblaient d’émotion, M. le député gardait son chapeau… et chacun était indigné, et l’on s’en allait en disant : « Si cet homme garde son chapeau devant des femmes, devant le roi, devant l’empereur, devant Dieu ! devant qui donc l’ôte-t-il ? » — Quelle question !… devant ses électeurs.


LETTRE ONZIÈME.

Les adieux. — Les projets d’été. — Les courses de Chantilly. — La mode des paris. — L’amour à la mode. — Projet de réforme gouvernementale.
17 mai 1841.

Oserons-nous avouer que nous sommes aujourd’hui à Paris quand tout le monde élégant est depuis trois jours à Chantilly ? Pourquoi pas ! N’est-il pas convenu que nous sommes d’une paresse incorrigible ? et c’est élégant d’être paresseux.

Cette semaine, presque toutes les fêtes ont été des adieux ; chaque maîtresse de maison avait dit : « Venez demain, venez après-demain, ce sera mon dernier mardi, mon dernier samedi… » Ce qui rappelait ce fameux billet d’invitation d’un romancier célèbre : « Le vicomte et la vicomtesse d’*** prient M. le marquis et madame la marquise de *** de leur faire l’honneur de venir passer la soirée chez eux le vendredi 22 mai 18… Ce sera leur dernier jour. » Pour cette année, tous les derniers jours ont été superbes. Il y a encore beaucoup de monde à Paris, et les adieux ont été brillants, ce qui vaut mieux que d’être déchirants.

« Que faites-vous de votre été ? » c’est la question que l’on se fait en s’abordant ; et l’on est étonné de la variété des réponses. Les uns disent : « Je vais à Bade. Venez-y, mesdames M…, de B… y seront ; il y aura plusieurs de vos