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LETTRES PARISIENNES (1841).

qui ne dansent pas, qui ne chantent pas, qui ne s’amusent jamais et qui sont laides. Et le mal que l’on dit d’elles est plus fatal que celui que l’on dit de vous, parce qu’elles vivent dans l’ombre et que l’ombre rend tout probable ; tandis que vous vivez dans la lumière, et la lumière justifie. Vous avez enfin pour vous consoler vos succès, et le succès est une arme qui vous venge des attaques de l’envie d’une bien terrible manière : en les expliquant.

L’événement de la semaine est le baptême du comte de Paris. La cérémonie était fort belle et très-bien ordonnée. Les parures des princesses étaient éblouissantes et du meilleur goût. Madame la duchesse d’Orléans portait une robe blanche ; elle était coiffée avec des plumes blanches, et couverte de magnifiques diamants. La reine des Belges, la duchesse de Nemours et la princesse Clémentine portaient des robes bleues ; elles étaient coiffées de plumes bleues et aussi couvertes de diamants ; et le soleil éclairait toutes ces parures : c’était un effet merveilleux !

L’enfant avait une longue robe de crêpe lisse doublée de satin blanc. Il a une charmante figure. Pendant le service, il ne paraissait pas trop effrayé ; mais quand monseigneur l’archevêque s’est approché de lui, il a pâli. Les enfants ont un instinct qui les avertit de ce qui est solennel. Un visage épouvantablement laid ne leur fera pas trop peur ; mais une figure belle, calme, sérieuse, froide, leur inspirera une crainte invincible. La cérémonie a duré démesurément pour les spectateurs arrivés de bonne heure afin d’être bien placés. La chaleur était excessive. Une femme de nos amies, qui assistait à cette solennité, en est revenue malade. En écoutant ses récits, nous nous disions en nous-même : C’est un bien grand bonheur que d’être paresseux, car enfin, si nous n’étions point paresseux, nous irions voir toutes ces choses-là, et ça nous fatiguerait bien.

Avant et après la cérémonie, les amateurs d’antiquité allaient regarder les fonts baptismaux de Notre-Dame, monument historique très-précieux. Nous avons trouvé une ancienne définition de ce monument dans un ouvrage, l’Histoire du palais de Fontainebleau, par M. Vatout, où nous découvrons chaque jour de nouveaux trésors historiques ; cette définition