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c’est le grand et durable succès qu’ont obtenu les Lettres parisiennes, dont les premières éditions ont été complètement épuisées.

L’indépendance d’esprit est une colline d’où l’on voit de haut et de loin ; ce qui le prouve, c’est que les événements qui se sont accomplis en 1848 sont prévus et annoncés en 1847, dans les Lettres parisiennes, avec une précision surprenante. La vérité y est impartialement dite à tous et sur tout : à qui déchoit et à qui s’élève ; à qui combat, à qui succombe, à qui triomphe ; aux royalistes dont l’aveuglement pousse la Royauté à sa perte, et aux républicains dont la surdité entraîne la République à sa ruine ; la vérité y est dite telle qu’il ne serait plus possible maintenant de l’écrire : aussi, du jour que la liberté qui est un droit n’a plus été qu’une tolérance, le vicomte Charles de Launay s’est de lui-même exilé du feuilleton et condamné volontairement au silence.

Où la liberté n’existe plus pour les partis, la liberté n’existe plus contre eux.

Où la compression a tous les droits, la raillerie n’en a plus aucun.

Alors l’histoire qui plaisante et qui passe, l’histoire vivante n’a qu’à se taire pour laisser parler l’Histoire qui juge et qui reste.

Telle est l’explication que madame Émile de Girardin faisait elle-même donner de son silence dans l’avis placé en tête du volume, intitulé le Vicomte de Launay, réimprimé en 1853, alors que nul ne prévoyait et ne pouvait prévoir que, deux années après, le 29 juin 1855, à ce silence temporaire succéderait le silence éternel.

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