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LE VICOMTE DE LAUNAY.

empressons de rendre compte ; l’assemblée aura été nombreuse, une foule de femmes célèbres s’y sera fait remarquer. Les femmes auteures auront sorti leurs petits chapeaux à petites plumes qui ne voient le jour que lorsque les quatre classes se réunissent, et leurs petites pèlerines soi-disant garnies de dentelles, mantelets de fantaisie, qui suffisent à la science. M. Dupaty, revêtu de l’habit tout neuf d’académicien, heureux de son feuillage, aura été modeste trois fois. Il aura parlé à l’Académie de son sein et de l’honneur qu’il y a d’être reçu dans ce sein ; il aura été spirituel, nous l’affirmons. Nous connaissons M. Dupaty depuis longtemps pour un homme loyal, qui n’a jamais manqué d’esprit ni de parole, et nous ne craignons point de nous engager pour lui.

M. Duval lui aura répondu avec bienveillance, puis aura glissé dans son discours quelques malices contre les romantiques, et quelques phrases de mélancolie et de découragement ; car le patriarche du drame français ne pardonne point à nos Duval modernes les belles scènes qu’ils ont puisées dans ses ouvrages ; c’est un mauvais père qui ne veut pas reconnaître ses enfants. Enfin, le bosquet académique, seule verdure qui survive à l’automne, se dispersera, et les gens de province s’en retourneront chez eux avec empressement pour écrire la lettre suivante : « Nous avons assisté ce matin à une séance de l’Académie française, » etc. Tout est plaisir pour un cœur de Bergerac, de Riberac ou de Quimper-Corentin.

L’hiver s’annonce comme devant être le plus beau des hivers ; on pense sérieusement à s’amuser. La politique est un loisir d’infirmes qu’on laisse aux petits esprits ; d’ailleurs, les grands hommes d’État ont toujours allié les affaires et les plaisirs. De nos jours, on recommence à découvrir que pédanterie n’est pas science ; les ennuyeux, tout-puissants naguère, perdent beaucoup de leur crédit ; leur magnétisme a moins d’empire depuis que l’on n’a plus la foi ; on ne leur laisse plus le temps de vous endormir ; de là vient que leur influence a pâli. M. de Metternich a prouvé qu’on pouvait être ensemble homme aimable et ministre habile ; le comte de Medern, le baron de Meyendorff, savent unir la grâce de l’esprit à la gravité d’une mission importante ; bref, l’esprit français nous est rendu par les étran-