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LE PALAIS DE LA VANITÉ

Le voyageur, en regardant avec attention, vit que cette cloche était d’or et qu’elle avait pour battant une perle fine en forme de poire, si belle qu’il en fut ébloui.

Il resta immobile à la contempler.

— Sonnez donc ! dit le vieillard qui s’impatientait.

— En vérité, je n’ose pas, reprit le jeune homme ; j’ai peur de bossuer cette perle en sonnant la cloche ; et ce serait dommage, elle est admirable !

— Ah bah ! s’écria le mendiant qui se connaissait mal en pierreries, laissez-moi faire, j’oserai bien, moi !

— Non, non ; frappons plutôt à la porte ; alors…

Mais il s’arrêta, car il pensa que cette belle porte était de cristal et qu’un coup de marteau la briserait.

Alors il prit le cordon de la cloche et il sonna, mais si doucement que l’on n’entendit rien.

Le mendiant, ennuyé de ces ménagements, saisit le marteau de la porte et frappa un si rude coup que la porte se brisa en éclats.

Ils entrèrent très-facilement.

Dans le vestibule, il n’y avait personne. Dans le palais de la Vanité, personne ne veut rester dans l’antichambre.

Et pourtant une antichambre semblable valait mieux que bien des salons : elle était ornée de statues représentant dieux et déesses, de tableaux représentant rois et reines, princes et princesses.

Le pavé était de jaspe et de porphyre ; mais ce pavé était si poli, si glissant, que le jeune homme, dont les souliers étaient ferrés, faillit tomber plusieurs fois dans le seul espace de trois minutes.

Il était obligé de se cramponner aux murs ; autant eût valu marcher sur la glace, du moins il aurait pu mettre des patins.

Le vieillard glissait bien un peu de son côté, mais son bâton de mendiant le soutenait.

Après bien des peines, ils parvinrent enfin dans un vaste salon où plusieurs personnes étaient réunies ; leurs costumes étaient magnifiques : les femmes étaient couvertes de pierreries ; elles en avaient jusque sur leurs riches manteaux de cour, qui traînaient sur les tapis ; leurs bracelets, leurs colliers,