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LE PALAIS DE LA VANITÉ


C’était un palais magnifique, bâti au bord d’un large chemin par lequel un grand nombre de voyageurs passaient chaque jour.

Ce palais avait quatre façades également belles des quatre côtés ; le portique était soutenu par des colonnes admirables. Cette colonnade empêchait, il est vrai, le jour de pénétrer dans l’intérieur ; mais elle était si belle à l’extérieur, que nul n’aurait osé la critiquer ; et, d’ailleurs, quel besoin a-t-on de voir le jour dans un palais ? N’a-t-on pas des lustres, des candélabres ? À quoi bon s’inquiéter du soleil ?

Le dôme de ce palais était entièrement doré ; ce n’était point comme le château des Invalides, qui n’a qu’un peu d’or sur le faîte ; là, il y en avait sur toute la coupole, et c’était éblouissant.

La reine qui habitait cette demeure était une grande et belle femme qui avait, à la place du cœur, un gros diamant taillé en cœur. On croyait que c’était pour cela qu’elle n’avait jamais aimé.

Sur le fronton de son palais, on avait écrit ces mots en lettres de rubis :

ICI L’ON OBTIENT CE QU’ON DÉSIRE.

Un jeune homme qui passait sur la route s’était arrêté pour regarder ce superbe monument ; ayant aperçu cette enseigne, car cela ressemblait beaucoup à une enseigne, il s’écria soudain : — Par ma foi ! je veux y entrer ; je suis las de ma condition, et je ne serais pas fâché d’être autre chose.

Comme il s’approchait du portique, il aperçut un mendiant assis sur une pierre et qui riait.

— Tu te moques de moi, vieux bonhomme, dit le voyageur ;