Page:Œuvres complètes de Delphine de Girardin, tome 3.djvu/396

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
388
LE CHIEN VOLANT.

à un serin. Il eut grand soin de lui, et chaque jour il l’aima davantage.

Il attendait avec impatience le commencement de l’automne ; il lui tardait de voir les jours diminuer pour n’être point aperçu dans ses promenades en l’air. La fée lui avait bien recommandé de ne pas s’envoler pendant le jour, à moins que ce ne fût chez elle, et encore il fallait partir de la prairie où était le pavillon. Dans ce jardin vaste et désert, et d’ailleurs protégé par la fée, il était à l’abri des regards ; mais tout autre endroit eût été dangereux.

Aussi Léon s’en allait-il tous les matins chez la princesse, suivi du chien volant, dont tout le monde se moquait le long du chemin.

— Quel affreux animal ! disaient les passants ; peut-on avoir un plus vilain chien !

— Il y a de petites levrettes qui sont si jolies !

— Il y a même des carlins qui sont mieux que ça !

— C’est un bichon ! dit un paysan avec dédain.

— Bichon vous-même ! reprenait la femme du concierge indignée ; j’ai un bichon qui est autrement beau que cela !

Léon était bien dédommagé de ces humiliations en arrivant chez la fée ; à peine était-il monté sur son chien et s’élevait-il avec lui dans les airs, qu’il oubliait toutes ces injures : si haut, il ne pouvait plus les entendre.

Il s’accoutuma peu à peu à voir son trésor méconnu, et bientôt son chien, dont lui seul savait le mérite, ne lui en parut que plus aimable.


CHAPITRE ONZIÈME.

UN AMI.


Cependant le jeune camarade de Léon, Henri, celui qui avait une cravate et des bottes, était attendu au château ; son fusil même était déjà arrivé : on l’avait apporté avec les paquets de son oncle, car l’oncle et le neveu devaient tous deux rester chez madame de Cherville à peu près le temps des vacances.