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LE CHIEN VOLANT.

Allons, ne pleure pas, lui dit-elle ; emmène ton chien dans ta chambre, puisque tu le veux, et reviens vite dîner avec moi ; car il y a bien longtemps que je ne t’ai vu.

Léon, consolé par ces paroles, emmena Faraud dans son appartement, l’établit bien doucement sur un bon coussin de bergère, et revint se mettre à table auprès de son excellente mère.


CHAPITRE DIXIÈME.

CE QU’IL AIME.


Léon mangea de bon appétit, sa promenade dans les cieux l’avait mis en appétit ; mais tout le temps du dîner il ne fut tourmenté que d’une idée.

— J’ai oublié de demander à la princesse avec quoi il fallait nourrir mon chien. Faut-il le traiter en oiseau ou en chien ? lui donner du millet ou des os à ronger ? Si je l’avais près de moi, je verrais tout de suite s’il mange du pain ; j’essayerais…

Comme il se livrait à ces réflexions, il entendit un grand bruit dans la maison : tous les domestiques étaient en rumeur : — Coquin ! voleur ! criaient-ils, veux-tu bien t’en aller, filou ! scélérat ! — et toutes sortes d’épithètes semblables.

Madame de Cherville sonna ses gens pour savoir d’où venait tout ce bruit.

— Madame, lui dit-on, c’est le cuisinier qui est furieux : le chien de M. Léon vient de voler deux côtelettes.

— Quel bonheur ! s’écria Léon, je sais maintenant ce qu’il aime, et je…

— Ah ! je te l’aurais bien dit ! interrompit madame de Cherville en riant ; je t’aurais épargné cette épreuve.

Léon, voyant que l’on poursuivait son chien dans la cour, s’empressa de l’aller chercher ; il le reconduisit dans sa chambre, et ferma la porte à double tour pour que le chien n’eût pas une autre occasion de s’échapper.

Éclairé sur la manière dont il fallait nourrir le chien volant, Léon désormais ne songea plus à lui offrir du mouron comme