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LE CHIEN VOLANT.

— Faraud ! j’aime bien Faraud… cependant Taquin est plus joli ; mais, pour l’appeler de loin, Faraud sera mieux. Sbogar est bien aussi, mais Taquin est plus amusant. Faraud est meilleur pour appeler : Faraud ! Faraud ! mais c’est trop commun, et je crois que Sbogar… cependant Sbogar !…

— Ah ! reprit la princesse, ne vas-tu pas recommencer tes indécisions de ce matin ? « Je veux un chien, je veux un oiseau ; je veux un oiseau, je veux un chien ; je veux du thé, je veux du café ; je veux du café, je veux du thé ! » Sais-tu que rien n’est plus ennuyeux qu’un enfant indécis, et que tu risques de n’avoir aucune des deux choses que tu désires, en ne sachant pas te décider pour l’une où l’autre.

Léon sentit fort bien cette vérité : il se décida tout de suite pour le nom de Faraud, qu’il donna dès l’instant à son nouvel ami ; et après avoir tendrement remercié la bonne princesse, il retourna chez sa mère suivi du chien volant.

Le pauvre garçon était bien lourdement chargé, car il emportait avec lui un secret, un trésor, une merveille !


CHAPITRE NEUVIÈME.

DISSIMULATION.


Léon, en arrivant chez sa mère, avait le cœur joyeux, et l’esprit déjà tourmenté. On ne possède pas une merveille sans inquiétude : une belle chose est toujours en danger.

Madame de Cherville, en apercevant son fils, courut l’embrasser.

— Enfin, dit-elle, te voilà de retour ! je commençais à être inquiète d’une si longue absence. Dis-moi, t’es-tu bien amusé ? Qu’as-tu fait chez la princesse ?

Léon se troubla à cette question, parce qu’il ne pouvait y répondre franchement.

— J’ai déjeuné, dit-il.

— Et après ?… Tu n’as pas déjeuné toute la journée ?

— J’ai pris du thé et du café.

— Depuis neuf heures du matin jusqu’à cinq heures du soir !