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LE CHIEN VOLANT.

À peine le chien volant eut-il touché la prairie, que Léon courut à lui et se mit à le caresser, à lui dire toutes sortes de gentillesses, toutes celles que l’on peut adresser à un chien et à un oiseau.

Il voulut lui faire faire l’exercice comme, on le fait faire aux chiens vulgaires ; mais le chien volant ne se prêta point à ce jeu trivial des chiens de cordonnier et autres, et Léon alla se plaindre à la fée de cette résistance.

— Ingrat ! dit la princesse tristement, je te donne une merveille et tu veux en faire une vulgarité ! Tu mériterais que je la donnasse à un autre enfant qui en serait plus digne que toi !

Léon reconnut qu’il avait tort.

Après avoir laissé au chien volant le temps de bien se reposer, il se mit à cheval sur son dos, et prononça bravement le mot magique :


NASGUETTE !
NASGUETTE !…


Et le chien docile s’envola.


CHAPITRE SIXIÈME.

L’OUBLI EST UN DANGER.


La princesse fut étonnée de la hardiesse de Léon et de la bonne tenue qu’il avait sur sa monture. Il s’élevait dans les airs à une hauteur effrayante, et nulle impression de terreur ne se peignait dans ses regards.

Pendant ce temps, la fée se livrait à ses réflexions. — Les enfants aiment le danger, pensait-elle ; oui, quand il leur est offert comme un plaisir ; faites-en un devoir, et vous les verrez pleurer pour s’y soustraire. Si j’avais dit : « Léon, monte sur le dos de ce chien, qui t’emportera à plus de mille pieds en l’air ! » il se serait récrié, il m’aurait appelée cruelle et m’aurait accusée de vouloir sa mort.