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LE CHIEN VOLANT.

Le fait est que le chien volant était affreux. C’était un gros chien à longues oreilles, quasi-caniche, quasi-bichon, quasi-barbet ; il était mal fait, presque bossu ; il portait la queue entre les jambes, et jamais on ne lui aurait soupçonné des ailes avec une mine si piteuse.

Voilà ton chien, dit la fée.

— Il n’a pas trop l’air d’un oiseau ! répondit Léon peu satisfait.

— Je vois qu’il ne te plaît guère, reprit la princesse ; mais dis-moi franchement, quel défaut lui reproches-tu ?

Léon n’osait pas dire : Je le trouve affreux ; il dit : — Je le trouve trop grand.

La fée sourit.

— Ne te plains pas de ce défaut, dit-elle ; tout à l’heure tu penseras peut-être que c’est un avantage.

Alors la princesse ayant fait signe au petit nègre de s’approcher, lui parla une langue étrangère, et Noireau emmena le chien dans le jardin qui entourait le pavillon.

La fée prit Léon par la main ; tous deux quittèrent le salon chinois et allèrent s’asseoir sur un banc pour voir ce qui se passerait.

— Je n’ai jamais vu un chien plus laid, pensait Léon ; j’aimerais mieux tout bonnement un serin. Que veut-elle que je fasse de ce vilain caniche, bichon, barbet ? car je ne sais pas seulement de quelle espèce il peut être… Il y a de si beaux oiseaux là-bas dans la volière ! pourquoi n’ai-je pas choisi un oiseau ?…

Tandis qu’il se livrait à ces réflexions, le petit nègre avait conduit le chien volant au milieu d’une grande pelouse verte, et après l’avoir caressé doucement, il s’était mis sans façon à cheval sur son dos.

Alors, le chien avait redressé les oreilles, comme fier de son cavalier, et tous deux étaient restés immobiles, attendant les ordres de la princesse.

Noireau se tenait droit sur son chien, et paraissait un fort bon écuyer.