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LA DANSE N’EST PAS CE QUE J’AIME.

CHAPITRE CINQUIÈME.

UN PEU DE FATIGUE.


Il était déjà quatre heures du matin ; on était au printemps : le jour venait de paraître.

Une fenêtre était ouverte, dans un des grands salons, déjà désert. Aglaure alla s’asseoir sur une banquette qui était devant la fenêtre ; elle regarda tristement dans la rue.

— Il faisait jour quand le bal des enfants a commencé, pensa-t-elle ; la nuit s’est passée, le jour est revenu, et je danse encore !

Mais aussi, elle se souvint d’avoir dit qu’elle danserait trois jours et trois nuits sans se fatiguer, et elle se trouva bien ridicule d’avoir dit cela.

Cependant, voyant que le bal était près de finir, elle voulut continuer à faire preuve de Courage et attendre que tout le monde fût parti. — Quand il n’y aura plus de musiciens, dit-elle, on ne me forcera plus à danser.

— Eh ! qui donc vous y forçait, petite folle, si ce n’est votre orgueil et votre entêtement ?

Voilà ce que je lui aurais répondu, si j’eusse été là ; mais, je dois l’avouer, je n’avais pas été priée à ce bal.

Déjà plusieurs laitières passaient dans la rue avec leurs petites charrettes, et s’impatientaient fort en voyant les voitures du bal qui obstruaient la circulation.

— Peut-on se coucher si tard, disaient-elles, et gêner ainsi le pauvre monde ! ne peuvent-ils pas s’amuser sans encombrer le chemin ?

Aglaure entendait ces paroles : — Si nous nous amusions ! pensait-elle.

L’air frais du matin l’engourdit à un tel point, qu’elle n’entendait la musique de la fête que comme un son lointain, qui peu à peu s’affaiblissait. Ces fatales paroles retentissaient toujours à son oreille :