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DE PONTANGES.

— Voilà une naïveté d’indifférence qui n’est pas flatteuse…

— C’est bien vulgaire ce que vous dites là, car vous savez parfaitement déjà que cela n’est pas indifférent…

En disant ces mots, Lionel fit encore jouer ses beaux grands yeux. Laurence sourit.

— Permettez-moi de vous dire à mon tour que ceci est encore plus vulgaire, reprit-elle ; me croyez-vous donc de ces femmes qu’on est obligé de flatter, qui pensent tout de suite que l’on s’occupe d’elles ? Comment puis-je croire que vous vous intéressiez à moi ? je ne vous connais pas !

— Ah ! je vous connais bien, moi, madame ! ai-je besoin de vous avoir vue longtemps pour savoir tout ce qu’il y a de noble dans votre cœur ? La vie que vous menez trahit malgré vous tout votre caractère. Il ne faut que vous apercevoir, vous comparer, pour comprendre ce que vous valez. Quand je regarde madame d’Auray, qui s’est mariée sans dot à un homme plein d’esprit, loyal, généreux, qu’elle trompe, qu’elle rend ridicule toute la journée… et que je vous vois, vous, si belle, à vingt ans, avec cent cinquante mille livres de rente, vivre à la campagne, loin de tous les plaisirs, loin du monde, où vous seriez si brillante, pour soigner un pauvre jeune homme qui ne sait même pas ce que vous faites pour lui, qui ne peut juger du sacrifice… ah ! je sens que vous êtes une noble femme dont on ne peut parler froidement, qu’on ne peut contempler sans adoration… N’est-ce pas vrai tout cela ? Avouez que je vous connais… convenez-en, ajouta-t-il en riant pour distraire Laurence et lui-même de son attendrissement… Convenez que je suis logique et que je vous explique bien clairement pourquoi l’on vous aime. En vérité, depuis deux jours je ne pense qu’à-vous : peut-être est-ce parce que je m’ennuie à mourir chez madame d’Auray et que la moindre distraction me paraît douce. Peut-être, si vous étiez moins belle, moins aimable, me préoccuperiez-vous tout autant… Ce qu’il y a de certain, c’est que vous m’êtes apparue comme un ange sauveur. Je suis si triste depuis quelques jours ! j’avais le spleen, j’allais me tuer, vous me sauvez la vie !…

Il dit tout cela d’un ton moitié sérieux, moitié léger : c’était un homme épris, jetant sa pensée sans prétendre faire un