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L’activité de leur ame est momentanée ; elle cesse avec les besoins du corps, et ne se renouvelle qu’avec eux. Elles n’ont qu’une vie empruntée, qui, uniquement excitée par l’impression des objets sur les sens, fait bientôt place à une espece de léthargie. Leur espérance, leur crainte, leur amour, leur haine, leur colere, leur chagrin, leur tristesse ne sont que des habitudes qui les font agir sans réflexion. Suscités par les biens et par les maux phisiques, ces sentimens s’éteignent aussitôt que ces biens et ces maux disparoissent. Elles passent donc la plus grande partie de leur vie sans rien desirer : elles ne sauroient imaginer ni la multitude de nos besoins, ni la vivacité avec laquelle nous [514] voulons tant de choses à la fois. Leur ame s’est fait une habitude d’agir peu : en vain voudroit-on faire violence à leurs facultés, il n’est pas possible de leur donner plus d’activité.

Mais l’homme, capable de mettre de la délicatesse dans les besoins du corps, capable de se faire des besoins d’une espece toute diférente, a toujours dans son ame un principe d’activité qui agit de lui-même.