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Je ne vous dirai rien cependant sur les avertissemens pleins de faussetés scandaleuses par où vous finissez chaque imposture : je repartirai de tout cela dans la lettre où j’espère montrer la source de vos calomnies. Je vous plains, mes pères, d’avoir recours à de tels remèdes. Les injures que vous me dites n’éclairciront pas nos différends, et les menaces que vous me faites en tant de façons ne m’empêcheront pas de me défendre. Vous croyez avoir la force et l’impunité, mais je crois avoir la vérité et l’innocence. C’est une étrange et longue guerre que celle où la violence essaye d’opprimer la vérité. Tous les efforts de la violence ne peuvent affoiblir la vérité, et ne servent qu’à la relever davantage. Toutes les lumières de la vérité ne peuvent rien pour arrêter la violence, et ne font que l’irriter encore plus. Quand la force combat la force, la plus puissante détruit la moindre : quand on oppose les discours aux discours, ceux qui sont véritables et convaincans confondent et dissipent ceux qui n’ont que la vanité et le mensonge : mais la violence et la vérité ne peuvent rien l’une sur l’autre. Qu’on ne prétende pas de là néanmoins que les choses soient égales : car il y a cette extrême différence, que la violence n’a qu’un cours borné par l’ordre de Dieu, qui en conduit les effets à la gloire de la vérité qu’elle attaque ; au lieu que la vérité subsiste éternellement, et triomphe enfin de ses ennemis, parce qu’elle est éternelle et puissante comme Dieu même.




RÉFUTATION
De la réponse des jésuites à la douzième lettre[1].


Monsieur,

Qui que vous soyez qui avez entrepris de défendre les jésuites contre les Lettres qui découvrent si clairement le dérèglement de leur morale, il paroît, par le soin que vous prenez de les secourir, que vous avez bien connu leur foiblesse, et en cela on ne peut blâmer votre jugement. Mais si vous aviez pensé de pouvoir les justifier en effet, vous ne seriez pas excusable. Aussi j’ai meilleure opinion de vous, et je m’assure que votre dessein est seulement de détourner l’auteur des Lettres par cette diversion artificieuse. Vous n’y avez pourtant pas réussi ; et j’ai bien de la joie de ce que la treizième vient de paroître, sans qu’il ait reparti à ce que vous avez fait sur la onzième et sur la douzième, et sans avoir seulement pensé à vous. Cela me fait espérer qu’il négligera de même les autres. Vous ne devez pas douter, monsieur, qu’il ne lui eût été bien facile de vous pousser. Vous voyez comment il mène la Société entière qu’eût-ce donc été s’il vous eût entrepris en particulier ? Jugez-en par la manière dont je vas vous répondre sur ce que vous avez écrit contre sa douzième lettre.

Je vous laisserai, monsieur, toutes vos injures. L’auteur des Lettres a promis d’y satisfaire, et je crois qu’il le fera de telle sorte, qu’il ne vous restera que la honte et le repentir. Il ne lui sera pas difficile de couvrir

  1. Cette lettre, dont l’auteur n’est pas connu, a été insérée par presque tous les éditeurs à la suite de la douzième lettre de Pascal.