Page:Œuvres complètes d’Apulée (éd. Garnier), tome 2, 1883.djvu/84

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d'autres, qui seront à peu près rondes ; et nulle part le cordeau n'alignera, nulle part l'équerre n'égalisera : nulle part le fil à plomb n'établira la verticale. Car aucune chose ne peut être à la fois hâtée et parfaite : on ne saurait rien voir qui réunisse le mérite de la perfection à l'agrément de la célérité. Je me suis prêté aux désirs de quelques personnes qui ont formellement désiré que le discours qu'on attendait de moi fût improvisé ; et en vérité je crains bien qu'il ne m'arrive ce que le fabuliste Ésope nous raconte être arrivé à son corbeau ; à savoir, qu'en cherchant à obtenir une gloire nouvelle, je ne sois contraint de perdre le faible mérite qui m'a été concédé antérieurement... Mais vous me questionnez sur cet apologue ; et je ne serai pas fâché moi-même de vous réciter une fable. Le corbeau et le renard ayant aperçu tous deux à la fois un morceau friand, se hâtaient, pour aller le saisir, avec un empressement égal ; mais égale n'était pas leur vitesse, parce que le renard courait et que le corbeau volait. L'oiseau eut donc bientôt pris les devants sur le quadrupède ; et, porté facilement dans les airs à l'aide de ses ailes déployées de droite et de gauche, le premier il s'abat sur le morceau, le saisit, et, ainsi doublement joyeux et de sa proie et de sa victoire, il reprend son vol, pour aller sur la cime d'un chêne voisin se percher en toute sûreté. Le renard alors, ne