Page:Œuvres complètes d’Apulée (éd. Garnier), tome 2, 1883.djvu/76

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deuil et dans l'attitude d'une profonde tristesse. Il s'avance plus près, pour savoir aussi (curiosité naturelle à l'esprit humain) quel était ce mort, attendu que personne n'avait répondu à ses questions ; peut-être, du reste, songeait-il à faire sur le cadavre quelque remarque dans l'intérêt de son art. Ce qu'il y a de certain, c'est que cet homme étendu là et presque mis en terre fut par lui enlevé au trépas. Asclépiade contemplait ce malheureux, dont tous les membres avaient été déjà saupoudrés d'aromates, le visage déjà recouvert d'une pommade odorante, en l'honneur de qui on préparait déjà le repas funèbre, lorsque des signes certains viennent le frapper. Il redouble d'attention, tâte le corps à plusieurs reprises, et reconnaissant qu'il recèle un principe de vie : “Cet homme n'est pas mort, s'écrie-t-il à l'instant ; qu'on éloigne donc ces torches, qu'on écarte ces feux, qu'on démolisse ce bûcher, que ce festin de mort soit reporté du cercueil à la table.” Des murmures, cependant, s'étaient élevés : les uns disaient qu'il fallait croire le médecin, les autres se moquaient de la médecine. Enfin, malgré les proches parents eux-mêmes (était-ce chez eux désir de l'héritage, ou n'ajoutaient-ils pas encore foi à ses paroles ?), après bien des oppositions et des difficultés, Asclépiade obtint pour le mort un instant de délai ; et l'ayant ainsi arraché des mains des fossoyeurs comme des griffes de l'enfer, il le rapporta