Page:Œuvres complètes d’Apulée (éd. Garnier), tome 2, 1883.djvu/59

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préoccupée par le bonheur, mon âme, en cet instant, aime mieux savourer son allégresse que la célébrer. Que faire ? je désire paraître reconnaissant ; mais telle est ma satisfaction, que je n'ai pas encore les loisirs de faire entendre des actions de grâces. Personne, non personne, même parmi les plus mal intentionnés, ne voudra trouver mauvais qu'en me comblant de joie un tel honneur me frappe d'une crainte respectueuse. Car où ai-je reçu ce témoignage ? dans le sénat carthaginois, corps aussi illustre que bienveillant. De qui l'ai-je reçu ? d'un homme supérieur tant par sa célébrité que par son instruction, d'un personnage consulaire, de qui être seulement connu est déjà un honneur insigne. C'est lui qui s'est en quelque sorte constitué mon panégyriste devant les primats de la province. Je sais en effet qu'il y a trois jours il a présenté une requête pour obtenir l'érection de ma statue dans un endroit des plus fréquentés. Il a rappelé entre autres détails que notre liaison, commencée sous d'honorables auspices, datait de l'époque où nous suivions tous deux les drapeaux de l'étude sous les mêmes maîtres ; puis il a passé en revue, dans l'ordre de leur importance, toutes les particularités qui peuvent le plus flatter mon amour-propre. J'ai dit son premier bienfait, celui de s'être ressouvenu qu'il avait été mon condisciple ; le second fut de se vanter, lui, personnage si éminent, que je payais son affection de