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APPENDICE

part, mes continuels échecs scolaires m’humiliaient et me décourageaient profondément, malgré la bonté avec laquelle mes parents les supportaient. D’autre part, rien ne m’intéressait autour de moi que la femme et, quand je n’avais pas d’aventures érotiques, je m’ennuyais mortellement. Je ne m’adonnais plus aux exercices physiques ; à la campagne, je ne chassais et ne montais à cheval que rarement. Mes camarades du gymnase, à mesure qu’ils grandissaient, vivaient d’une vie de plus en plus intellectuelle. La plupart se passionnaient pour la politique, lisaient la littérature révolutionnaire clandestine, s’affiliaient aux sociétés socialistes secrètes, communiaient dans la religion communiste, anarchiste et terroriste. Ils lisaient des livres sérieux : Spencer, Mill, Buckle, Renan, Louis Blanc, Taine, Marx, Lassalle, Laveleye, Proudhon, Darwin, Häckel, Sumner Maine, Morgan, Engels, Tarde, F.-A. Lange, Büchner, Letourneau, etc. (Je parle des jeunes gens de 15 à 20 ans). Moi, je me contentais de savoir les noms des auteurs qu’ils lisaient : quand j’essayais de lire ces livres, je m’endormais au bout de quelques pages. Mes camarades discutaient à perte de vue sur les questions morales, philosophiques, sociales (pas sur les questions religieuses car tous étaient athées et matérialistes)… Ces discussions glissaient sur moi comme l’eau sur les vitres. Je n’y prenais pas part. Les romans m’intéressaient davantage, mais quand ils étaient trop sérieux, ils m’ennuyaient aussi. Mes deux états habituels étaient, ou l’excitation érotique directe, ou la prostration mélancolique accompagnée de rêveries souvent également érotiques. Quand je me remettais à travailler pour le gymnase avec une certaine énergie, c’était pendant les intervalles d’abstinence sexuelle, mais, comme je l’ai dit, cela ne durait guère. Je ne me masturbais jamais, ayant horreur de cet acte et ne sachant même pas exactement comment cela se faisait. De peur d’une masturbation involontaire, je ne mettais même jamais mes mains sur mes parties sexuelles. Mais j’avais des remords à cause de mes relations sexuelles si nombreuses. Ce qui contribuait à augmenter ma dépression morale, c’était la nécessité où je me trouvais de mentir souvent à mes