Page:Études de psychologie sexuelle, tome VI (extrait), Confession sexuelle d’un Russe du sud, 1926.djvu/70

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
157
APPENDICE

que c’est par l’imagination que je reçois la plus forte excitation sexuelle. Les images mentales ont sur moi, à cet égard, autant et plus d’action que les images physiques. Mais ce n’est pas tout à fait de l’autoérotisme : enfermez-moi entre quatre murs et l’obsession sexuelle m’abandonnera bientôt. Mon imagination, pour travailler dans la direction érotique, a toujours besoin d’un stimulus extérieur : vue des organes sexuels de la femme, vue d’un dessin obscène, lecture pornographique, conversation grivoise. Il ne suffit pas qu’il y ait auprès de moi une femme, jolie et appétissante ; la vue de la plus jolie, de la plus charmante femme si elle est habillée avec décence et a un maintien honnête, ne me suggère jamais le désir de coïter avec elle, ne provoque jamais chez moi une érection. Pour que l’appétit vénérien se réveille chez moi, il est absolument nécessaire que la femme se comporte d’une manière provocante, que j’entende des paroles lascives, que je voie des nudités ou bien que je sois sous l’impression d’une lecture érotique, d’une conversation obscène toutes fraîches. Les souvenirs érotiques anciens cessent de m’exciter, une lecture lascive me laisse généralement froid si elle n’est pas neuve pour moi, c’est-à-dire si elle date ; car, au commencement, les mêmes grivoiseries m’excitent, même si je les relis plusieurs fois de suite : au bout de quelques jours l’aiguillon s’émousse. — Ainsi je puis rester pendant longtemps dans un état de neutralité sexuelle absolue : une image voluptueuse qui, par hasard, se présente du dehors (il est absolument nécessaire qu’elle vienne du dehors et ne soit pas engendrée par mon propre esprit), vient brusquement rompre cet équilibre et m’enflammer d’ardeurs charnelles. Je ne sais pas jusqu’à quel point ces dispositions psychologiques sont anormales et morbides : c’est à un spécialiste de se prononcer là-dessus.

Je n’ai jamais éprouvé de sentiments homosexuels véritables[1]. Je me souviens cependant qu’entre 12 et 13 ans, la vue d’un certain camarade de classe du même âge que moi me causait une légère

  1. De même, les tendances sadiques ou masochistes, même à un degré infime, sont pour moi subjectivement incompréhensibles.