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APPENDICE

causent des sensations plus cuisantes que les remords des plus mauvaises actions. Chez moi, les plaies de cette espèce ne se cicatrisent jamais : elles restent éternellement fraîches, le temps ne peut rien sur elles. Eh bien, dans ma pudeur d’enfant il n’y avait que des éléments de ce genre : la peur (suggérée par l’exemple et les paroles des grandes personnes) de l’inconvenance et du ridicule.

Les baignades des garçons et des filles du village avaient ordinairement lieu à la même heure de la journée. Il m’est arrivé plusieurs fois de voir deux groupes de garçons et de jeunes filles, de 14 à 18 ans, se baigner dans la rivière à la distance d’une vingtaine de mètres l’un de l’autre. Ils étaient absolument nus, dans l’eau jusqu’aux genoux seulement, se faisant face, se plaisantant grossièrement et se bombardant avec des boulettes de limon extraites du lit du fleuve : ils dirigeaient leurs projectiles de manière à atteindre les parties génitales de l’autre sexe, ce qui provoquait des tempêtes de rires. Quand je prenais un bain chaud le soir dans la maison, j’avais soin que les volets fussent fermés sans laisser aucun interstice, car je savais que les jeunes servantes (et elles étaient nombreuses chez mon oncle) observaient, par les fenêtres, mes cousins pendant qu’ils se baignaient. J’ai même surpris une fois une conversation de deux d’entre elles qui ne laissa pas de m’étonner : « L’as-tu donc bien vu, quand il se baignait hier, le panitch ? » (en petit-russien : le jeune maître). — Si je l’ai vu ! Je voyais ce qu’il a entre les jambes comme je te vois ! J’en pissais même de plaisir ! » (ya aj stsala vid vissilia !)

Comme une assez grande distance me séparait toujours des jeunes filles que je voyais se baigner dans la rivière, je ne pouvais bien voir les détails de leur nudité : je voyais sur leurs bas-ventres des triangles noirs, mais je ne savais pas que ces triangles étaient formés de poils. Par suite, je me demandais si c’était de la peinture ou la couleur naturelle de leur peau à cet endroit ou bien si elles mettaient sur leur vulve (pour la cacher et par pudeur ?) des pièces de papier gommé ou d’étoffe. Je savais pourtant que les hommes avaient du poil sur