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L’ÉTAT PSYCHIQUE PENDANT LA GROSSESSE

admettre la nécessité et la pérennité de la religion, si chez nous toute la société instruite, la fleur et l’élite de la nation, un million d’individus ou davantage, vit sans éprouver le moindre besoin des croyances religieuses ? À ce point de vue, le Russe typique ce n’est pas l’excentrique Tolstoï, mais bien Kropotkine qui, pendant sa longue existence, a médité sur une foule de choses, mais jamais sur Dieu, ni sur l’âme. La question religieuse ne se pose pas devant lui, pas plus que la question de l’astrologie, de la chiromancie, etc. Dans ma famille, comme dans toutes les familles avec lesquelles nous étions en relation, on ne parlait jamais aux enfants de Dieu, de la vie future, de Jésus-Christ.

Cela affligeait la brave Pélagie qui voulut convertir les petits païens et nous enseigna la religion, ce qui fut possible sans que nos parents en sussent rien, car, s’ils nous aimaient, ils s’occupaient de nous assez peu, comme je l’ai déjà dit. Pélagie non seulement m’expliqua les principaux dogmes chrétiens, mais m’apprit même des prières que je récitais avec componction. Enfin elle se décida à me mener, ainsi que l’aînée de mes deux sœurs, à l’église pour nous faire communier. Dans l’église grecque (à laquelle j’appartenais par ma naissance, car, en Russie, le baptême est obligatoire pour tous les enfants russes, c’est-à-dire nés des parents grecs-orthodoxes ; l’État ne considère pas comme des Russes les catholiques, les juifs, les mahométans, les protestants : ce sont seulement « des sujets » allogènes » (inorodtsi) de l’Empire », mais non des Russes. Je connais un étudiant juif, sujet russe, qui a été très étonné quand, dans un document officiel français, on lui attribua la nationalité russe ; il crut à une erreur, et s’écria : Mais non, je suis de nationalité juive, ne comprenant pas la réponse du fonctionnaire français : « En France, nous connaissons la religion juive, mais nous ne connaissons pas de nationalité juive. ») Il n’y a pas d’âge déterminé pour la première communion, on peut faire communier l’enfant dès qu’il est baptisé et, dans le peuple, cela se fait quelquefois. Mais, avant de me mener à la communion, Pélagie m’expliqua que le prêtre me confesserait. Je me préparais donc à la confes-