Page:Études de psychologie sexuelle, tome VI (extrait), Confession sexuelle d’un Russe du sud, 1926.djvu/25

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
112
L’ÉTAT PSYCHIQUE PENDANT LA GROSSESSE

tout les soldats. En effet, tout près de notre maison il y avait un corps de garde où j’avais de nombreux amis parmi les soldats. Par principe, mes parents laissaient aux enfants une pleine liberté de mouvements (de même que, par principe également, ils ne nous punissaient jamais. Si je consentais à des corvées désagréables telles que, par exemple, l’étude du piano, c’était par politesse et faiblesse de volonté et non par contrainte extérieure) : l’institutrice devait se soumettre à ce système tout en le trouvant étrange. Nous sortions quand nous le voulions, faisions des connaissances pour notre propre compte. Moi, j’ai noué des relations d’amitié avec plusieurs soldats qui, à mes yeux, étaient entourés d’une auréole de majesté quasi-divine, surtout les cavaliers : hussards, dragons. J’éprouvais une volupté céleste à toucher leurs boutons de métal, leurs galons, leurs casques, mais surtout leurs armes. Comme tous les enfants, j’étais fou des armes (sabres, fusils, pistolets) et je restais des heures entières dans la caserne à passer ma main sur ces objets qui me fascinaient. Combien aurais-je été heureux si mes parents, au lieu de m’acheter des chemins de fer et autres joujoux qui m’intéressaient peu, m’avaient acheté des sabres et des fusils ! Mais ils ne le faisaient jamais, probablement par principe, et moi j’étais trop timide pour exprimer mes désirs. Mes parents, internationalistes et antimilitaristes, ne savaient pas quel petit admirateur des « traîneurs de sabre » et quel chauvin était leur fils ! En effet, les soldats m’ont initié au patriotisme russe en m’assurant que l’armée russe n’avait jamais été battue et ne pouvait être vaincue par aucune force humaine, parce qu’un seul soldat russe est plus fort que 50 soldats allemands, français, anglais ou turcs. J’ai même demandé à mon père si tout cela était vrai. Il me dit que non ; mais je ne l’ai pas cru. Les affirmations de mon ami le hussard me persuadaient davantage, comme émanant d’un homme compétent, d’un spécialiste, alors que mon père était un simple pékin. Il est si agréable d’appartenir à une nation dont les soldats n’ont jamais pu être battus ! Mon père me disait que Sébastopol avait été pris par les Français, mais mes amis les soldats assuraient que, tout au contraire, ce sont