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APPENDICE

ridionale (surtout à Kieff) ; l’été nous allions à la campagne ou au bord de la mer. Je me souviens que jusqu’à l’âge de 6 ou 7 ans, quoique couchant dans la même chambre avec mes deux sœurs (l’une d’elles avait 2 ans de moins que moi, l’autre était plus jeune que moi de 3 ans) et me baignant avec elles, je ne remarquais pas du tout que leurs organes sexuels fussent autrement faits que les miens. Tant il est vrai qu’on ne voit que ce à quoi on s’intéresse ! (chez l’enfant, voisin de l’animal, l’utilitarisme de la perception est peut-être particulièrement marqué ; l’enfant est curieux, il est vrai, mais est-ce en vertu d’une curiosité désintéressée ? J’en doute).

Voici un souvenir à ce sujet. Ayant l’âge de 6 ans environ (je puis préciser mon âge à cause de quelques autres souvenirs connexes), j’ai eu l’idée un jour d’habiller de mon propre costume de petit matelot ma sœurette de 4 ans. C’était dans une chambre où il y avait un vase de nuit dans lequel je me suis mis à pisser en ouvrant la braguette de mon pantalon. Puis, je tendis le vase à ma sœur en lui disant de faire comme moi. Elle ouvrit la braguette, mais ne sortit pas, naturellement, le membre que je ne savais pas ne pas exister chez elle et pissa dans le pantalon. La maladresse de ma sœur m’indigna, je ne compris pas du tout pourquoi elle n’avait pas pissé de la même manière que moi et cet accident ne m’apprit rien touchant nos différences anatomiques. Autre souvenir « urinaire », mais plus ancien (je devais avoir 5 ans environ).

À cette époque vivait chez nous une fillette qui avait à peu près mon âge. C’était, comme je l’ai su plus tard, la fille d’une prostituée de bas étage qui, en mourant, laissa un enfant de deux mois : cette fillette. Ma mère recueillit l’enfant (la mort ayant eu lieu dans une grande maison dont nous louions un étage), la fit allaiter et eut l’idée de l’élever avec ses propres enfants. Mais chose intéressante pour ceux qui croient à l’hérédité des sentiments moraux, cette enfant, quoique recevant absolument la même éducation que nous autres et qui ne savait même pas être un enfant adoptif, manifesta dès les premières années de sa vie de fortes inclinations immorales. Nous ne savions pas du tout qu’elle n’était pas notre sœur, elle non plus n’en savait rien et pour elle notre