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L’ÉTAT PSYCHIQUE PENDANT LA GROSSESSE

Deux ou trois jours après mon arrivée à Naples, un individu se cramponna à moi sur la place Carlo en se faisant fort de me faire voir des choses « vraiment intéressantes », « Je ne vous trompe pas, me disait-il, je suis un parfait gentleman, io sono galantuome, je vous montrerai des choses que vous ne verriez pas ailleurs ; vous pourrez vous vanter de ne pas avoir été pour rien à Naples, vous aurez un sujet de conversation avec vos amis. Je vous conduirai dans une famille très honnête, una famiglia onestissima, des gens de bien, gente dabbene veramente ; ils ont deux fillettes que vous pourrez voir et toucher nues, mais pas coucher avec, à moins d’un arrangement spécial avec les parents. Ce sont des fillettes de 15 et de 11 ans, jolies comme un cœur, et le prix est très modéré, c’est 40 francs. Vous ne voulez pas ? Voyons, 35 francs, 30 francs et un pourboire pour moi ! »

Mû d’une part par la curiosité d’observateur des mœurs, excité d’autre part par l’aiguillon charnel dans cette ambiance de luxure, je me laissai tenter, pour mon malheur.

Nous montâmes dans l’appartement de ces parents pratiques. Sur la plaque de la porte il y avait : « Un tel, avvocato ». À en juger par l’appartement et l’ameublement, c’était, en effet, des gens bien, sinon des gens de bien, Tout portait le cachet de l’aisance. La mère vint me « faire l’article », haussa le prix en affirmant que l’entremetteur s’était trompé, là-dessus appela les fillettes. L’audace de leurs regards démontrait qu’elles étaient loin d’être des novices. Cela tranquillisa un peu ma conscience, Pour la calmer, je me disais : « Je ne corromps personne. Si on peut m’accuser de favoriser le trafic des mineures, c’est dans la même mesure dans laquelle tout homme qui paie une prostituée favorise le mal social de la prostitution. Je ne pourrais pas changer la destinée de ces fillettes, à moins de soulever un grand scandale public, et qui sait si cela aurait pour elles des conséquences heureuses, qui sait aussi quelle tournure l’affaire prendrait pour moi, surtout dans une ville comme Naples où les pouvoirs publics sont souvent les compères des criminels,