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côté de l’Iran ; si ces deux places sont convenablement gardées, le vaste empire de l’Hindoustan est à l’abri des invasions étrangères. Cette remarque du célèbre auteur de l’Ayin-Akbari est aussi juste que profonde ; elle est devenue le pivot de la politique anglaise dans l’Asie centrale. Lorsque les nouveaux maîtres de l’Inde, au commencement du siècle actuel, purent craindre une attaque de la France ou de la Russie du côté de l’ouest, ils cherchèrent à enchaîner étroitement la Perse à leurs intérêts pour couvrir l’Inde dans cette direction, et lorsque la Perse, cédant au prestige dont les victoires de Napoléon remplissaient le monde, rentra franchement dans l’alliance française, ils se replièrent sur l’Afghanistan[1]. »

La mission que l’empereur avait confiée en 1807 au général Gardane, près la cour de Perse, n’avait d’autre but en effet que de préparer la conquête de l’Inde ; elle eut pour contre-coup immédiat l’envoi d’une mission anglaise à Caboul, sous la conduite de M. Elphinstone.

C’est de ce moment que datent les premières relations officielles de l’Angleterre avec l’Afghanistan ; mais cette alliance, qui était le but poursuivi par la mission anglaise, s’écroula en même temps que la dynastie des Douranis. Les luttes intestines qui suivirent la mort de Timour réduisirent, en effet, à néant les engagements pris, et, d’un autre côté, l’attitude correcte du gouvernement des Indes en faveur du prince Choudja dépossédé ne pouvait lui attirer les sympathies de son successeur au trône. Dost-Mohammed ne se montra cependant pas ostensiblement hostile à l’Angleterre dès son arrivée au pouvoir ; il pria même lord Aukland, alors gouverneur général de l’Inde, de lui prêter son concours « moral » pour reprendre à Rendjüt-Sing la province de Peschawar. Ce fut l’origine de la mission du capitaine Burnes à Caboul, mission qui fut immédiatement contrecarrée par celle du capitaine russe Wikowich.

À son retour de Caboul, le capitaine Burnes fit à son gouvernement un tableau si alarmant de la prépondérance conquise par les Russes dans ce pays, que lord Aukland résolut d’intervenir ouvertement dans sa politique intérieure et de détrôner Dost-Mohammed pour le remplacer par le prince Choudja. En échange de la protection qu’on allait lui accorder, ce dernier s’engagea par un traité signé à Lahore entre lui, le chef de la confédération des Sicks et le gouvernement indien, à abandonner toute idée ultérieure de revendication sur les possessions enlevées aux Afghans par Rendjüt-Sing sur les deux rives de l’Indus.

Le 1er octobre 1838, la guerre fut déclarée à l’Afghanistan. Une colonne anglaise, sous les ordres de John Keane, se concentra à

  1. Vivien de Saint-Martin.