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Khyber, abandonnant au vainqueur ses bagages et ses trésors. Quelques mois après, le malheureux prince fit une tentative sur Candahar, mais elle échoua misérablement ; cette fois Choudja fut complétement abandonné par les siens et l’Afghanistan tout entier, à l’exception du pays de Cachemire, reconnut l’autorité de Mahmoud ; Fethi-Khan reçut le titre de grand vizir comme récompense de ses services. Bientôt, par suite du goût effréné de son maître pour les plaisirs, le ministre devint le véritable souverain, et cette omnipotence qu’il acquit dans la gestion des affaires du pays ne manqua pas d’attirer sur sa tête les haines et les jalousies, et notamment celles du prince Kamran, fils et héritier présomptif de Mahmoud.

Reconstituer le royaume afghan tel qu’il était au moment de sa splendeur, devait être le premier rêve de Fethi-Khan ; pour cela il fallait commencer par reprendre la province de Cachemire qui était restée indépendante entre les mains d’Atta-Mohammed-Khan, fils du vizir de Choudja ; mais pour atteindre Cachemire on devait traverser le Pendjab, ce qui était impossible sans la permission du maharadjah des Sicks, Rendjüt-Sing.

Fethi-Khan obtint, moyennant la promesse de neuf lacks de roupies, non-seulement l’autorisation de faire passer ses troupes par le Pendjab, mais encore un renfort de 10,000 hommes ; dans ces conditions, la citadelle de Cachemire fut enlevée rapidement et tout le pays soumis en quelques semaines. Il ne restait plus qu’à tenir les engagements pris envers Rendjüt-Sing ; Fethi-Khan se montra si peu empressé à les remplir que le maharadjah se crut autorisé à recevoir les ouvertures secrètes que lui faisait le commandant d’Altok de lui remettre cette place, et moyennant un lack de roupies il se rendit possesseur de cette importante forteresse.

À cette nouvelle Fethi-Khan s’empressa de quitter Cachemire et de marcher sur Attok. « Il trouva l’armée sicke[1] campée dans la plaine de Tchatch, à peu près à deux milles du fort ; la chaleur était accablante ; les Sicks avaient le double avantage de la position et de la facilité de se procurer de l’eau. Le vizir, qui n’avait que du mépris pour son antagoniste, fit marcher contre lui son frère Dost-Mohammed-Khan, à la tête de 2,000 Afghans ; ce chef prit toute l’artillerie des Sicks ; il avait démonté deux de leurs canons et se disposait à profiter de son avantage, quand il s’aperçut qu’il n’était pas soutenu et que toute l’armée de son frère s’était débandée. Au moment où Dost-Mohammed-Khan effectua son attaque, des gens mal intentionnés vinrent annoncer au vizir que son frère avait été fait prisonnier avec toute sa division, et d’autres non moins perfides contèrent à Dost-Mohammed que son frère avait été tué. Il

  1. M. Eyriés écrit seïk.