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Les tablettes de cire de Palmyre.

Après la classe de L il faut placer les tablettes de cire trouvées à Palmyre ou Tablettes d’Assendelft, qui les y acheta en 1881. Elles contiennent 14 fables, dont 3 qui sont en prose ne se laissent rattacher à aucun de nos manuscrits ; les onze autres sont de Babrius. Hesseling qui les a étudiées et publiées les place au IIIe siècle de notre ère, antérieurement à la chute de Palmyre, 272 ou 273.


Classe de B.

Dans ce classement chronologique j’attribue la 4e place à la 4e classe de nos manuscrits, la classe B. Elle comprend 4 manuscrits d’inégale importance : le manuscrit d’Oxford que les Allemands appellent la paraphrase bodléienne, Ba, le Palatinus quintus de Nevelet, Bb, le Parisinus 1277 publié par Rochefort, Be, et le Vaticanus 949bis., Bd. Ba contient 148 fables, dont 92 ont des sujets communs avec Babrius, mais dont 81 seulement s’accordent avec lui et sont des paraphrases en prose de ses fables ; le reste diffère de Babrius ou ne se trouve pas dans son œuvre. Bb n’a que 91 fables, qui toutes se retrouvent dans Ba avec quelques variantes. Il est bien évident que ces deux manuscrits sont postérieurs à Babrius, au moins pour la partie qui vient de ce poète, mais de combien ? Pius Knöll, qui a publié le premier la paraphrase bodléienne et qui l’a soigneusement étudiée, y a relevé quelques mots et quelques tournures qui lui paraissent dater de l’époque byzantine[1], et, rapprochant certaines constructions du manus-

  1. Dans son étude intitulée Die Babrianischen Fabeln des cod. Bodleianus, 1876, il signale comme byzantins : στηλιτεύω, au sens de flétrir, ἄρκος, pour ἄρκτος, ἐτζύριζον, βάκλον, βύκανον, δεῖπνος, εἰ avec le subjonctif, ἐάν avec l’indicatif. Je rayerais de sa liste des mots comme ἄρκος qui est déjà dans la Septante ; βύκανον, bien voisin de βυκάνη qui est dans Polybe ; βάκλον, qui n’est qu’une autre forme de βάκυλα, pluriel que Plutarque emploie au sens de faisceaux ; δεῖπνος qu’on trouve dans un manuscrit de Diodore de Sicile. J’y ajouterais d’autres mots comme ἐδυσώπει (15), au sens de prier, ὑπεξουσίων (44), au sens de sujets ; φακιόλιον (79) ; προσπετάσας (79), au sens de voler ; ἐπετάσθησαν (124), s’envolèrent ; δώσῃ subjonctif aoriste premier de δίδωμι ; προσφάγημα (281). J’y ajouterais surtout de graves négligences dans les constructions, par exemple dans la fable 16 συνεβούλευενκαταπεσεῖν ἔν τινι βόθρῳ καὶ ἀναπαύσεως τυχεῖν : il lui conseillait de se laisser tomber dans une fosse, qu’ainsi il aurait du repos, et : ἐγχυματίσαι ἔλεγεν αὐτῷ καὶ τῆς ὑγείας τυχεῖν : il disait de lui faire une infusion, et qu’ainsi il recouvrerait la santé. Cet emploi de l’infinitif aoriste pour le futur τεύξεσθαι fait contresens. Une incorrection du même genre se remarque dans la fable 200 : ὄμνυμί σοι μηδὲν κακὸν παθεῖν παρὰ τοῦ λέοντοςπαθεῖν doit être traduit comme s’il y avait πείσεσθαι. Plus bizarre encore est l’emploi du participe aoriste (58) ; ἠκολούθει θρηνῶν μηδὲν θερίσας, et (246) : βάτραχος ἐπηκολούθει δεῖπνον καὶ αὐτὸς τῷ ἰκτίνῳ γενόμενος ; on attendrait θεριῶν et γενησόμενος. Citons encore un résumé si bref qu’il en est incorrect (296) : Ὁ δὲ ταῦτα μᾶλλον ὁρῶν πλείω τὴν λύπην εἶχε ὅσῳ μᾶλλον ἑώρα τοσούτῳ πλείω… Il y a bien d’autres incorrections encore mais je n’y vois rien de propre à l’époque byzantine ; je n’y vois qu’un effet de l’inhabileté et de la négligence du rédacteur.