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le courant, puis s’assit en pleurant. Alors Hermès lui apparut à lui aussi, et apprenant le sujet de ses pleurs, il plongea et lui rapporta aussi une cognée d’or, et lui demanda si c’était celle qu’il avait perdue. Et lui, tout joyeux, s’écria : « Oui, c’est bien elle. » Mais le dieu, ayant horreur de tant d’effronterie, non seulement garda la hache d’or, mais il ne lui rendit même pas la sienne.

Cette fable montre que, autant la divinité est favorable aux honnêtes gens, autant elle est hostile aux malhonnêtes.

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LES VOYAGEURS ET L’OURS


Deux amis cheminaient sur la même route. Un ours leur apparut soudain. L’un monta vite sur un arbre et s’y tint caché ; l’autre, sur le point d’être pris, se laissa tomber sur le sol et contrefit le mort. L’ours approcha de lui son museau et le flaira partout ; mais l’homme retenait sa respiration ; car on dit que l’ours ne touche pas à un cadavre. Quand l’ours se fut éloigné, l’homme qui était sur l’arbre descendit et demanda à l’autre ce que l’ours lui avait dit à l’oreille. « De ne plus voyager à l’avenir avec des amis qui se dérobent dans le danger », répondit l’autre.

Cette fable montre que les amis véritables se reconnaissent à l’épreuve du malheur.

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LES VOYAGEURS ET LE CORBEAU


Des gens, qui voyageaient pour certaine affaire, rencontrèrent un corbeau qui avait perdu un œil. Ils tournèrent leurs regards vers lui, et l’un d’eux leur conseilla de rebrousser chemin ; c’était, à son avis, ce que voulait dire le présage. Mais un autre prenant la parole dit : « Comment cet oiseau pourrait-il nous prédire l’avenir, lui qui n’a même pas prévu, pour l’éviter, la perte de son œil ? »