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d’être ramené à une seule loi, c’est une idée qui a commencé à envahir l’esprit humain et à s’imposer à lui ; mais, d’autre part, il est trop Grec pour ne pas rester un peu polythéiste, pour ne pas croire que des forces multiples et diverses gouvernent le monde et se le disputent. N’est-ce point pour cela qu’il imagine son monde des Idées, vivant dans le sein de Dieu, substances et âmes intérieures de toutes les choses qui existent ? Qu’est-ce que ceci ? C’est un Olympe spirituel substitué à un Olympe matériel ; c’est un Olympe d’âmes pures substitué à un Olympe de surhommes, à un Olympe anthropomorphique. C’est le livre d’un païen mystique, d’un païen spiritualisé. Vous comparez ; vous rapprochez ; vous vous souvenez que Platon adore les mythes, c’est-à-dire les théories habillées en fables, en manière de poèmes épiques ; et vous vous dites que la rencontre d’un mythologue et d’un spiritualiste a produit cette théorie des idées vivantes, des abstractions qui sont des êtres, des abstractions qui sont des forces, des abstractions qui sont des dieux. Et vous pouvez encore vous tromper ; mais vous ne mécontenteriez pas Platon qui, comme tous les philosophes, écrit moins pour être admiré que pour être compris et même moins pour être compris que pour faire penser. Vous avez pensé ; il a gagné la partie.

Et encore il y a des idées générales qui viennent dans le cerveau du penseur après toutes les autres,