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CHAPITRE X

RELIRE



Lire est doux ; relire est — quelquefois — plus doux encore. « À Paris, on ne relit pas, disait Voltaire ; vive la campagne où l’on a le temps ! » Relire est, en effet, une occupation de gens peu occupés. Royer-Collard disait : « À mon âge, on ne lit plus ; on relit. » C’est, en effet, plaisir de vieillard. Il faudrait se persuader que c’est plaisir et profit de tous les âges, et ne pas le réserver exclusivement pour celui où je reconnais qu’il est plus à sa place qu’à tout autre.

Il y a bien des raisons pour relire ; j’en choisis trois qui me viennent plus précisément à l’esprit.

On relit pour mieux comprendre. Ce sont surtout les philosophes, les moralistes, les penseurs, qu’on relit dans ce dessein, et ce n’est pas mal fait ; mais il n’est auteur qu’on ne puisse relire dans cette intention, et il en est qui sont tellement dignes d’être relus qu’on doit les relire pour cet objet. Il n’y a pas d’auteurs plus clairs que La Fontaine, que La Bruyère. J’assure qu’à les relire pour la vingtième fois on trouve des passages que l’on n’avait point compris comme ils devaient l’être, et que l’on entend