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est devenu « Baisse », puis « Besse », et, finalement, « Bau-Besse » a été inscrit sur les cartes sous le nom de… Bobèche !

Non moins démonstratif que les précédents, l’exemple suivant montrera les graves inconvénients que peut avoir le remplacement de ou par u. Millo-Aourés « mille vents » est une expression géographique parfaitement appropriée à la localité qu’elle désigne, car elle exprime que les vents y soufflent de tous les côtés. Cette forme orthographique ayant semblé par trop méridionale, on a cru, sans doute, la rendre plus élégante en écrivant « Mille-Aures ». Puis, en prévision peut-être de la future « Entente cordiale », de Mille-Aures on a fait….. Mylors !

Sans insister sur cette entrée de ville appelée Porto dé la Sâou « porte du sel », — parce que c’était là qu’on percevait la gabelle, — transformée premièrement en « Porte de la Sau » et fatalement ensuite en Porte de l’Assaut, on pourrait multiplier à foison ces citations. Peut-être paraîtraient-elles réjouissantes aux personnes ayant le goût du calembour ; dans tous les cas elles attristent profondément celles que préoccupent avec juste raison les erreurs trop nombreuses de notre nomenclature territoriale.

Quelques érudits, parmi lesquels il faut citer MM. H. Ferrand[1], F. Arnaud[2], Alphonse Meillon[3], Jean Bourdette[4], François Mar-

    droits creux en général. Il y a dans les Pyrénées, en Provence, en Languedoc et même dans le centre de la France, un grand nombre de lieux qui sont ainsi nommés. Beaucoup de Baïsses dans la vallée du Rhône désignent l’emplacement d’anciens marais desséchés. La Baïssa de Peyra-Cava (Alpes-Maritimes) est synonyme d’ « enfoncement de la pierre creuse ». Bacho est également employé dans la vallée d’Aure (Hautes-Pyrénées) pour indiquer un bas-fond. Il ne faut pas confondre Baïsse avec Besse, Besséa ou Bessière, qui veulent dire une « plantation de bouleaux blancs ».

  1. Henri Ferrand. De l’orthographe des noms de lieux. Le sens des noms de lieux (in Ann. du Club Alpin français). Paris, 1882. — Du même auteur : De l’orthographe des noms de lieux (in Ann. C. A. F.). Paris, 1901 (2e article).
  2. F. Arnaud. L’Ubaye et le Haut-Verdon ; essai géographique. 1 vol. in-8o de 218 pages contenant de nombreuses esquisses topographiques. Barcelonnette, 1906. (M. Arnaud a résolument adopté l’orthographie dialectale, ce dont on ne saurait trop le féliciter).
  3. Alphonse Meillon. Esquisse toponymique sur la vallée de Cauterets. Cette étude fortement documentée est, depuis plusieurs années, en cours de publication dans le Bulletin pyrénéen, qui s’imprime à Pau (Basses-Pyrénées).
  4. Jean Bourdette. Nombreux ouvrages sur La Bigorre et le Labéda (Lavedan) [Hautes-Pyrénées].