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au peuple : chaque jour des industriels s’approprient tel ou tel procédé chimique, et on a pu voir le médecin Koch, ligué avec son maître Guillaume, chercher à faire de la guérison des sujets un monopole de l’État ; mais trop de chercheurs sont à l’œuvre pour que les désirs égoïstes puissent s’accomplir. Ces monopoleurs de science se trouvent dans la situation de ce magicien des Mille et une Nuits qui a descellé le vase où depuis dix mille ans dormait un génie enfermé. Ils voudraient le faire rentrer dans son réduit, le clore sous triple sceau, mais ils ont perdu le mot de la conjuration, et le génie est libre à jamais.


Ainsi l’ignorance diminue, et, chez l’évolutionniste révolutionnaire, le savoir dirigera bientôt le pouvoir. C’est là le fait capital qui nous fait espérer avec confiance que l’Humanité est entrée dans une période de développement heureux et que, malgré l’infini complication des choses, les éléments de progrès l’emportent sur ceux de régression. Certes, l’espérance et la crainte se combattent dans les esprits et la netteté de nos connaissances scientifiques ne nous permet pas encore de répondre avec certitude là ce sujet. Cependant, en juxtaposant tous les arguments, ceux qui témoignent d’une décadence et ceux qui prouvent une marche en avant, il paraît que ceux-ci sont de beaucoup les plus forts et que chaque jour d’évolution nous rapproche de cette révolution qui détruira le pouvoir despotique des personnes et des choses, et l’accaparement personnel des produits du travail collectif.

Une première cause de grand espoir est que nos