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reux voit ces choses aussi bien que le puissant et son esprit n’en est pas moins frappé. Pour la jouissance de quelques-unes de ces conquêtes de la science, le privilège a disparu. Menant sa locomotive à travers l’espace, doublant sa vitesse et en arrêtant l’allure à son gré, le mécanicien se croit-il l’inférieur du souverain qui roule derrière lui dans un wagon doré, mais qui n’en tremble pas moins, sachant que sa vie dépend d’un jet de vapeur, d’un mouvement de levier ou d’un pétard de dynamite !

La vue de la nature et des œuvres humaines, la pratique de la vie, voilà les collèges où se fait la véritable éducation des sociétés contemporaines. Les écoles proprement dites ont une importance relative bien moindre ; cependant elles ont subi leur évolution dans le sens de l’égalité. Il fut un temps, et ce temps n’est pas encore bien éloigné de nous, où toute l’éducation consistait en simples formules, en phrases mystiques, en extraits de livres vénérés. Entrez dans une de ces écoles de musulmans, ouvertes à côté des mosquées : vous y verrez des enfants passant des heures entières à épeler ou à réciter des versets du Koran. Entrez dans une école de prêtres chrétiens, protestants et catholiques, et vous entendrez de niaises cantilènes, des récitations absurdes, en latin ou en français incompréhensible. Mais voici que dans quelques-unes de nos écoles, par l’effet de la pression d’en bas, un nouvel enseignement commence à se mêler à ces tristes routines ; au lieu d’y réciter seulement des formules, on y expose maintenant des faits, on y montre des rapports, on y signale des lois. Quels que soient les commentaires dont l’instituteur routinier accompagne ce qu’il enseigne,