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GUERRE CONTRE LES WÉLATABES

le gouvernement fut désormais confié, non plus à un duc, mais à des comtes.

[12.] Cette affaire ainsi réglée, la guerre fut portée chez les Slaves que nous appelons Wilzes, mais dont le vrai nom, en leur langue, est « Wélatabes »[1]. Les Saxons y participèrent, mêlés aux troupes auxiliaires d’autres nations qui suivaient fidèlement les étendards du roi[2], quoique leur obéissance, à eux, fût feinte et plus ou moins sûre. La guerre avait pour cause les incursions perpétuelles auxquelles les Wélatabes se livraient sur les terres des Abodrites, jadis alliés des Francs[3], et l’impossibilité d’y mettre un terme sans recourir aux armes.

Depuis l’Océan occidental, s’étend vers l’est, sur une longueur inconnue, mais sur une largeur qui nulle part n’excède cent mille pas et qui souvent est moindre[4], une mer sur le pourtour de laquelle vivent de nombreuses nations. Les Danois et les Suédois, que nous appelons Normands, en occupent les rives septentrionales et toutes les îles, tandis que les rives orientales sont habitées par les Slaves, les Esthes, et d’autres peuples parmi lesquels se distinguent surtout ces Wélatabes chez qui le roi porta alors la guerre.

  1. Ce chapitre est écrit principalement à l’aide des Annales royales, 2e rédaction, ann. 789 : « Natio quaedam Sclavenorum est in Germania, sedens super litus oceani, quae propria lingua Welatabi, francica autem Wiltzi vocatur. Ea Francis semper inimica et vicinos suos, qui Francisfoederati erant, odiis insectari belloque premere ac lacessire solebat… Ipse exercitum duxit, etc. » (éd. Kurze, p. 85). Comme, parmi les alliés des Francs, l’annaliste range plus loin les Abodrites (ann. 798, p. 105) et déclare, en outre, sous l’année 808 (p. 126), que les Wilzes ne cessaient à cette date de les poursuivre depuis longtemps de leurs attaques, Éginhard en a conclu qu’en 789 les incursions des Wilzes s’étaient produites en territoire abodrite. C’était peut-être vrai, mais peut-être aussi en partie seulement.
  2. Ce renseignement semble emprunté à la version primitive des Annales royales, ann. 789 : « Et fuerunt cum eo in eodem exercitu Franci, Saxones, Frisiones…, Suurbi necnon et Abodriti » (éd. Kurze, p. 84).
  3. Éginhard s’inspire ici d’un autre passage des Annales royales (2e rédaction, ann. 798, éd. Kurze, p. 105), où il est rappelé que les Abodrites ont « toujours été » (semper fuerunt) les alliés des Francs ; mais au lieu de répéter qu’ils l’ont « toujours » été, il écrit qu’ « ils l’étaient jadis » (olim erant), parce qu’entre temps (en 817) les Abodrites avaient fait défection.
  4. Nous ignorons d’où a été tirée cette description de la Baltique. L’estimation qui est donnée de la « largeur » de cette mer ne révèle pas un homme particulièrement bien informé.