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VII
L’AUTEUR

— non pas certes le Charlemagne de la période héroïque, celui de la guerre d’Italie, de la guerre d’Espagne et des plus rudes campagnes de Saxe, mais le Charlemagne des années de gloire, qui, en 800 — assez peu de temps après l’arrivée au palais du jeune écolier de Fulda — alla recevoir à Rome la consécration solennelle de ses longs et fructueux efforts. Jusqu’en 814, il a vécu à la cour, a assisté aux cérémonies présidées par le souverain, a eu l’occasion de l’observer de près. C’est donc incontestablement un témoin.

À ce témoin toutefois il ne faut demander que ce qu’il a pu voir ou savoir, c’est-à-dire, non pas les secrets de la politique poursuivie par Charlemagne, mais seulement et plus modestement des détails sur l’homme, son caractère, sa vie privée ou sa vie d’apparat.

S’il est digne de foi, c’est déjà beaucoup. Mais est-il digne de foi ? Nous l’allons voir en étudiant l’œuvre même.

II.L’œuvre.

1. Date de composition. — Éginhard ne nous a laissé aucune indication sur la date à laquelle il a pris la plume ; mais son livre semble avoir été rédigé à une époque où les souvenirs du grand règne commençaient déjà à perdre de leur précision et à s’estomper dans un lointain et glorieux passé.

On a cru longtemps, il est vrai, et répété qu’Éginhard avait écrit au lendemain de la mort de Charlemagne, avant 821 à tout le moins, sous prétexte que les moines de Reichenau possédaient déjà alors un exemplaire de son œuvre. Et ceci serait prouvé par un catalogue de leur bibliothèque dressé « l’an 8 du règne de l’empereur Louis » (Louis le Pieux, affirme-t-on). Mais bien des détails donnent à penser que la partie du catalogue où figure la mention de la Vie de Char-