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prisonnière sans le savoir dans cette chambre où, quand il le voudrait, il entrerait la surprendre et la capturer ; ou plutôt il allait frapper aux volets comme il faisait souvent quand il venait très tard ; ainsi du moins, Odette apprendrait qu’il avait su, qu’il avait vu la lumière et entendu la causerie et lui, qui tout à l’heure, se la représentait comme se riant avec l’autre de ses illusions, maintenant, c’était eux qu’il voyait, confiants dans leur erreur, trompés en somme par lui qu’ils croyaient bien loin d’ici et qui, lui, savait déjà qu’il allait frapper aux volets. Et peut-être, ce qu’il ressentait en ce moment de presque agréable, c’était autre chose aussi que l’apaisement d’un doute et d’une douleur : un plaisir de l’intelligence. Si, depuis qu’il était amoureux, les choses avaient repris pour lui un peu de l’intérêt délicieux qu’il leur trouvait autrefois, mais seulement là où elles étaient éclairées par le souvenir d’Odette, maintenant, c’était une autre faculté de sa studieuse jeunesse que sa jalousie ranimait, la passion de la vérité, mais d’une vérité, elle aussi, interposée entre lui et sa maîtresse, ne recevant sa lumière que d’elle, vérité tout individuelle qui avait pour objet unique, d’un prix infini et presque d’une beauté désintéressée, les actions d’Odette, ses relations, ses projets, son passé. À toute autre époque de sa vie, les petits faits et gestes quotidiens d’une personne avaient toujours paru sans valeur à Swann : si on lui en faisait le commérage, il le trouvait insignifiant, et, tandis qu’il l’écoutait, ce n’était que sa plus vulgaire attention qui y était intéressée ; c’était pour lui un des moments où il se sentait le plus médiocre. Mais dans cette étrange période de l’amour l’individuel prend quelque chose de si profond, que cette curiosité qu’il sentait s’éveiller en lui à l’égard des moindres occupations d’une femme, c’était celle