Outamaro/Peintures du maître
PEINTURES DU MAÎTRE
La peinture japonaise exécutée uniquement à l’aquarelle ne se produit guère que sous trois formes : le kakémono ou le makimono ; l’éventail ; l’esquisse ou plutôt le dessin terminé, le dessin a l’apparence d’un dessin de graveur, fait par le maître pour la taille de la gravure en bois ; — et encore ce dessin est-il toujours à l’encre de Chine, le peintre n’essayant ses colorations, que sur quelques épreuves tirées en noir pour lui et ses amis.
Dans les voyages au Japon et les descriptions d’objets d’art du pays, il n’est pas parlé de kakémonos d’Outamaro conservées dans les Musées ou les collections de princes, et Hayashi n’a pu me renseigner que sur un seul qu’il possède là-bas.
C’est un kakémono d’un faire très délicat, très léger, d’un lavage d’eau très limpide, représentant, sur un papier brunâtre, dans un médaillon, trois têtes de femmes : la tête d’une princesse chinoise coiffée d’un oiseau de métal ; la tête d’une princesse japonaise, les cheveux dénoués sur les épaules ; la tête d’une femme de la cour.
M. Anderson dans la grande collection des Japanese paintings, formée par lui, et cédée au British Museum, en 1882, ne signale pas de kakémono d’Outamaro, et Hayashi n’en connaît pas en Amérique.
Les kakémonos que nous pouvons donc décrire, se bornent à ceux-ci :
Le kakémono de la femme qui attache une moustiquaire au-dessus de son enfant couché à terre, appartenant à M. Bing.
Le kakémono de la Japonaise déroulant une poésie, et le kakémono de la Japonaise vue par derrière, et d’une main qu’on ne voit pas soutenant la retombée de sa ceinture et de sa robe : deux kakémonos qui sont ma propriété.
Le kakémono de M. Hayashi, représentant une danseuse mimant une danse de caractère, une esquisse rapide de premier coup.
Enfin le kakémono de trois mètres de largeur de Bing, auquel il faut peut-être donner, pour pendant, un autre kakémono à peu près de la même grandeur représentant, éclaboussée d’or, une autre « Maison Verte » à l’époque du printemps, où sont peintes plus de quarante femmes, mais où je ne trouve pas le caractère d’Outamaro dans sa maturité, mais qui, à la rigueur, pourrait être un kakémono de la jeunesse de l’artiste.
Quant aux éventails, M. Wakaï l’ancien associé de M. Hayashi possèderait au Japon, sur papier argenté, un artistique éventail d’Outamaro, représentant une Japonaise en pied, d’un travail cursif, mais d’une grande habileté et d’un grand charme, — éventail qui serait monté en kakémono.
Pour les dessins d’Outamaro exécutés pour la gravure, on n’en connaît pas, ainsi qu’on connaît des dessins d’Hokousaï chez quelques amateurs, ainsi qu’on connaît des dessins d’Hokkeï chez M. Duret.
Outamaro a aussi laissé des makimonos, ces rouleaux de plusieurs mètres, où se déroule en largeur une composition, et où il aurait mis les meilleures qualités de son talent.
M. Hayashi possèderait au Japon un de ces rouleaux érotiques, d’une hauteur de trente-cinq centimètres sur une largeur de cinq mètres, à peine teinté sur papier écru de la Chine, et ressemblant assez à de certaines impressions de Shunman : des grisailles dans une tonalité légèrement mauve, avec des riens de colorations discrètes, çà et là, et comprenant neuf scènes d’une exécution admirable. Le possesseur déclare que les expressions, les attitudes, les mouvements sont tellement de la nature et de la vie, qu’on oublie qu’on est en face d’une représentation érotique, et parlant du fini et la variété de l’ornementation des robes, et au milieu de cela, de la valeur du noir de laque des chevelures dénouées de femmes, il affirme qu’à son avis, c’est la plus belle œuvre connue d’Outamaro.